d’Alain Parrau

Dans le tumulte des manifestations parisiennes, le narrateur rencontre Assia, une réfugiée syrienne. Des fragments d’histoire individuelle et collective se nouent, se séparent, kaléidoscope de souvenirs, de rêves, d’émotions, qui enveloppe les personnages d’un tissu sensible à travers lequel ils tentent de se rejoindre et de s’aimer. La révolution syrienne, sa terrible répression, la mémoire vive des insurrections passées et les émeutes d’aujourd’hui entrent en résonance, hantées par la défaite, la puissance du soulèvement, le désir d’un monde délivré de l’oppression. Un roman-poème de la révolte, crépusculaire, halluciné, né de l’embrasement, en bordure d’explosion. L’auteur écrit pour fendre la nuit.
Né en 1955, Alain Parrau a publié un ouvrage de référence sur la littérature concentrationnaire, Écrire les camps. On peut lire ses poèmes dans la revue Po&sie, et ses articles sur Lundimatin.
Extrait
Je me souviens des manifestations les premiers jours, disais-tu. Nous étions sortis de nos terriers. La terre éboulée formait des monticules noirs, des traces de sang et de goudron avaient coulé le long des parois, autour des maisons éventrées, sur les blocs de béton alignés comme des miradors. Des oiseaux tournaient autour de nos abris. Nos yeux pleuraient. Nous avancions lentement, chargés de pierres, de branches, de morceaux de pain, de vieilles bouteilles. Je sentais le vent sur mon visage. Les murs avaient gardé une odeur de bois rance, nos voix tremblaient, nos ombres glissaient sur les plafonds effondrés. Nous traversions des terrains vagues, des champs embourbés, des banlieues inconnues. Nos blessures séchaient au centre d’un soleil poussiéreux et rance. On s’écartait sur notre passage. Certains demandaient avec crainte qui nous étions, d’autres souriaient en nous tendant des fruits, des verres remplis de bière ou d’eau. En arrivant dans la ville de Daraa une grappe hérissée de bannières et de bâtons s’est ruée sur le boulevard. Une vague immense et soudain des cris ont éclaté et percé les façades. Les soldats qui surveillaient les gares, les centres commerciaux, les bâtiments publics ont sursauté. Des flics cagoulés aux yeux de poissons se sont déversés partout sur les trottoirs comme des chenilles. Est-ce que nous avions peur ? Est-ce que nos mains tremblaient ? Je me souviens seulement de la joie d’être si nombreux, de l’étonnement d’être si nombreux.
- 75 pages ; 10 euros
- ISBN 978-2-9570289-5-5
- Parution avril 2022
Disponible en librairie ou à la commande par mail : ovbedition@gmail.com ou à cette adresse : On verra bien, 6 rue de la Nation, 87000 LIMOGES France
Presse & Médias :
Une chronique du livre sur le site de la Bibliothèque Fahrenheit 451.
Une autre chronique sur En attendant Nadeau.